Gouverner c’est prévoir. Une vérité à nuancer en cas de […]
Gouverner c’est prévoir. Une vérité à nuancer en cas de crise subite. Certes. L’incapacité du gouvernement à fournir rapidement des masques, mais aussi du gel hydroalcoolique, à tous les professionnels – pas seulement de santé – est sur le point de provoquer une vague d’exercices du droit de retrait, dont les conséquences peuvent être dramatiques. Juridiquement, ce retrait serait abusif si le masque était aussi inutile que le gouvernement le prétend. Imaginons que les routiers ou les pompistes sur les autoroutes s’arrêtent. Le réassort des commerces alimentaires, grandes surfaces comprises, ne serait plus assuré.
Il faut aussi équiper d’urgence les commerces encore ouverts, alimentaires en particulier, les forces de l’ordre, les agents des services publics, les salariés dans les entreprises, les Français qui prennent les transports en commun, ceux qui font leurs courses. Bref toute la France !
Les employeurs, privés comme publics, doivent assurer la sécurité de leurs salariés. Doivent-ils commander des masques en Chine et attendre trois ou quatre mois pour être livrés ?
Nous sommes en guerre ? Que toutes les entreprises soient réquisitionnées pour fabriquer des masques et des gants !
Dès février (voire avant !), des articles sérieux laissaient penser que sans mesures radicales précoces, le feu de broussaille pourrait devenir un incendie terrifiant. La polémique autour des propos de l’ancienne ministre de la Santé, Agnès Buzyn, le confirme. On ne les a pas prises. Ni confinement, ni test, puisque ça ne sert à rien. Et donc pas de masques de protection, pas même en nombre suffisant à l’hôpital où l’on manque de tout. Pas assez de masques pour les médecins libéraux, les infirmières, les aide-soignants. L’administration française ( bien sûr la meilleure du monde) n’a pas alerté le gouvernement et organisé l’importation et la fabrication massives de masques dès que l’on voyait qu’ils étaient portés par toute la population en Asie. Mais le défaut d’anticipation est aussi le résultat d’une conviction qu’on arrêtera le virus comme nos douaniers avaient arrêté le nuage radioactif de Tchernobyl.
En Chine, au Japon, en Corée, porter le masque est une évidence. Mais ici, à Paris, non seulement, les pouvoirs publics flanqués de leurs experts scientifiques et de leurs administrations ont fauté. Et ils ont l’outrecuidance d’enfoncer le clou (du cercueil) et de répéter que porter un masque ne sert à rien si on n’est pas professionnel de santé. Esprit de Tchernobyl, tu es bien là !
Roselyne Bachelot, ancienne ministre de la santé, l’a dit et martelé : en matière de santé, on n’en fait jamais assez en matière de prévention. Les vies humaines valent toutes les dépenses de prévention !
Un jour, l’exécutif et la haute administration pourraient être jugés pour non-assistance à peuple en péril. Nous avons avancé ce concept dès le 16 mars. Mais ils ne le seront pas. En France, toute l’opposition a fait des pieds et des mains pour que le premier tour des municipales se déroule « normalement ».
Force est de constater qu’ailleurs, hors Asie, on n’a pas fait mieux. La puissante Amérique de Donald Trump pourrait même connaître pire. Bien pire. Certains, comme la Suède, les Pays-Bas ou le Royaume-Uni ont fait un dangereux pari : laisser le virus se propager jusqu’à ce qu’une immunité collective finisse par éteindre l’épidémie. Un pari d’autant plus fou qu’il entraînera obligatoirement une saturation totale et immense du système sanitaire, et donc des victimes en très grand nombre.
Ces pays, en particulier le Royaume uni, sont partiellement revenus sur ce choix.
Nous, en France, nous nous sommes moqués de nos amis italiens. Nous les avons même ignorés !
Nous avons fait du « en même temps » : en même temps, on organise des élections et on appelle au confinement. En même temps il est interdit d’assister à l’enterrement d’un parent et on est autorisé à faire son jogging et ses courses au marché. En même temps, on est incapable de protéger la population contre le coronavirus et on flingue l’économie et la vie sociale. En même temps, on commet des fautes énormes dans la prise en charge de la crise et on ment pour justifier son inaction.
C’était un autre « en même temps » que l’on attendait d’Emmanuel Macron, de son gouvernement, de l’administration, de ses experts et parfois, ayons l’humilité de le reconnaître, des Français.
Et maintenant ? Confinement total ? Mais il faut bien manger ? A Wuhan, le confinement a été gradué : vis-à-vis de l’extérieur d’abord. Puis les habitants n’ont plus pu sortir de chez eux que tous les trois jours. Puis le comité de quartier leur déposa des vivres en bas de chaque immeuble car il leur fut interdit de sortir de leur domicile ! Vivra-t-on le même sort ?
Un état de siège avec couvre-feu imposé par l’armée ?
Il est peut-être trop tard pour éviter une possible hécatombe. Les 30 000 morts de la canicule de 2003 risquent fort d’être largement dépassés ! Reste à en limiter l’ampleur en copiant sur ceux qui réussissent, s’il est encore temps.